Interview of Loic Fauchon, Honorary President of the World Water Council, « Au Bout du Jour » (RTBF, La première) – in French

    INTERVIEW DE LOIC FAUCHON,
    RADIO TELEVISION BELGE FRANCOPHONE (RTBF), 
    EMISSION
    RADIOPHONIQUE « Au Bout du Jour »,  
    par Eddy Caekelberghs,
    le 27 août 2018.

     

    E.C : Je vous propose d’aller ici au bout du fil d’une info qui va nous emmener vers l’Afrique sub-saharienne. Ce sera là qu’en 2021 se tiendra le 9ème Forum Mondial de l’Eau, pour la 1ère fois d’ailleurs dans cette région, et nous avons pour nous en parler le Président Honoraire du Conseil Mondial de l’Eau, Loïc Fauchon. Bonsoir Loïc Fauchon.

    L.F. : Bonsoir.

    E.C. : L’eau, c’est l’enjeu du 21ème siècle ?

    L.F. : C’est non seulement un enjeu mais ça doit être aussi la solution du 21ème siècle, car on ne peut pas se satisfaire du fait que plusieurs milliards de personnes n’aient pas un accès convenable à l’eau et encore moins à l’assainissement, qui véhicule tant de maladies.

    E.C. : Il y a donc eu 8 éditions précédentes entre Marrakech au Maroc en 1997, La Haye, Mexico, Istanbul, Marseille et puis aussi la Corée, le Brésil en 2015.

    Pourquoi ce choix de l’Afrique Sub-Saharienne ? Parce que c’est une portion de l’Afrique plus particulièrement frappée par le problème de l’eau ?

    L.F. : D’abord, vous l’avez souligné tout à l’heure pour la 1ere fois en Afrique sub-Saharienne, après Marrakech au tout début. Quelque part on peut dire assez logiquement que c’était le tour de l’Afrique puisque vous observez que ces forums ont lieu dans différentes parties du monde. Aussi, parce que l’Afrique, pas seulement sub-saharienne, mais l’ensemble de l’Afrique, est un continent où l’on rencontre tous les problèmes liés à l’eau. A la fois les problèmes de la ressource, comment trouver l’eau, comment disposer de l’eau dans des régions souvent très arides et comment la distribuer, la partager correctement ? Il ne suffit pas d’avoir de l’eau à disposition. Encore faut-il avoir les moyens de l’apporter aux populations et d’assurer ensuite son épuration pour ne pas provoquer ces maladies dont on parlait à l’instant.

    Donc il y a une grande légitimité de l ‘Afrique à organiser ce forum, plus particulièrement au Sénégal. Pourquoi ? Parce que le Sénégal a été choisi par ses pairs à l’Union Africaine après un vote très démocratique entre plusieurs candidatures. Et nous nous réjouissons de travailler avec nos collègues Sénégalais et nos collègues Africains durant les 3 ans qui nous séparent de ce prochain forum.

    E.C. : Donc effectivement c’est une initiative triennale ce forum. Est ce qu’il y a là une capacité de décision suivie d’effets ? Parce qu’il y a bien sûr des experts qui rencontrent des responsables locaux. Mais est-ce que vous constatez des effets majeurs ensuite ?

    L.F. : La rencontre est toujours utile. Quand vous permettez la rencontre de ceux qui n’ont pas l’habitude se croiser, à la fois les gens de terrain, les ONG, les petites entreprises ou les grandes, les Etats, dont les plus pauvres, il y a un échange d’expérience. Je dis bien un échange, et pas un transfert qui a un relent un peu néo-colonialiste. Aujourd’hui, il faut se mettre tous autour de la table pour regarder quelles sont les solutions, mais en plus, apporter les réponses. Et ce sera l’enjeu de ce forum. C’’est-à-dire, d’une part au niveau macro-économique, pour obtenir que les grandes banques, les Etats les plus puissants, modifient leurs axes de coopération. Pour parler du niveau global. Et puis au niveau local, je voyage beaucoup en Afrique et les gens me disent : « oui on sait, vous avez les solutions mais ce n’est pas ça, nous, qui nous concerne, nous voulons les réponses à ces solutions, nous voulons les voir dans notre vie quotidienne ». Et l’idée de ce forum de Dakar, de ce forum du Sénégal c’est de mettre en place les réponses sur le terrain, qu’elles soient partagées par l’ensemble de la communauté internationale et en ce sens nous voulons un forum extrêmement concret, et sur lequel les citoyens qui n’ont pas accès à l’eau, ou qui ont peu accès à l’eau, pourront nous juger et pourront, je l’espère, obtenir des réponses qui leur sont nécessaires.

    E.C. : 319 millions d’africains d’Afrique sub-saharienne qui n’ont pas accès à l’eau potable, rapidement d’un mot encore Loïc Fauchon. Ça peut être demain la raison majeure, par crise hydrique,  de la migration ?

    L.F. : C’est une des causes de la migration, la pauvreté en général. Et l’absence d’accès à l’eau, c’est souvent la pauvreté. Vous avez dit 320 millions, le chiffre est malheureusement sans doute plus important dans un continent où la croissance démographique est colossale. Certaines projections nous donnent 2 milliards d’habitants en Afrique en 2050. Donc il s’agit à la fois d’urgence et il y a nécessité d’apporter des réponses concrètes sur le terrain. C’est notre devoir et c’est une nécessité mondiale car les problèmes que nous connaissons en Afrique, nous les  connaissons évidemment sur d’autres continents.

    E.C. : Merci Loïc Fauchon. Nous allons suivre donc ces travaux, à la fois du Conseil Mondial de l’Eau et de ce futur forum à Dakar en 2021.

    Merci de nous en avoir donné, de nous en avoir préfacé le contenu.